Cinquante-neuf ans dont huit en fauteuil roulant pour Bruno, un nom qui n’est pas le sien. Une fois grand-père, parler à visage découvert de sexualité n’est pas évident. Et puis, c’est « un tabou ». S’il est en fauteuil, c’est parce qu’un groupe électrogène lui est tombé sur le dos à vingt ans. Des séances hebdomadaires de kiné l’ont maintenu debout jusqu’à ses cinquante ans. « Mais, un jour ou l’autre, je savais que ce serait fini », raconte Bruno, depuis sa petite maison en métropole rennaise. Alors il connaît « l’avant et l’après fauteuil ». Quand il a compris qu’il ne pourrait plus marcher, il ne s’est pas posé la question du sexe, « parce qu’handicap est égal à célibat dans la tête de tous les gens », regrette-t-il. Pourtant, cela fait maintenant deux ans qu’il est en couple et a une vie sexuelle « normale ». Il ajoute : « Quand je suis allongé, je suis une personne normale ! »
Connais-toi toi-même
Pas besoin de « se réinventer une sexualité » pour le quinquagénaire. Son handicap est intégré à ses moindres gestes : « Il est vrai qu’il y a des choses qu’il faut anticiper, comme le fait d’enlever ses chaussures par exemple », confie Bruno, « j’adapte ma tenue pour garder de la spontanéité et avoir moins mal aussi, ça va ensemble ». Le soir venu, il se change : un pantalon plus simple à enlever, un t-shirt large, pas de sous-vêtements... Des petites choses que Bruno ne considère pas vraiment comme des stratégies, mais comme des automatismes. Son épaule droite fragilisée le force à s’adapter : « Si je ne veux pas me retrouver bloqué dans le lit, il ne faut pas que je sois tout le temps du même côté. » Maintenir des relations spontanées, c’est le but de Bruno. Peu importe que certaines positions ou lieux ne soient plus envisageables. Connaître son corps et ses limites est un défi pour ceux qui souffrent de handicaps.