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Marcel Nuss a fondé l'association pour la promotion de 

l'accompagnement sexuel (Appas), en 2015. Il milite depuis quinze ans pour sa légalisation en France et a publié Handicaps et Accompagnements à la vie affective, sensuelle et sexuelle.

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Chapitre 2

Apprentissage érotique

L’accompagnement sexuel peut avoir de véritables vertus thérapeutiques. C’est ce qu’estime Marcel Nuss, fondateur de l’Appas, association française qui milite pour sa promotion : « Ça aide les gens à se revaloriser. Apporter à la personne un autre regard sur elle-même permet de la réincarner. » Julien en témoigne depuis son appartement en région parisienne. Il est atteint du syndrome de Bardet-Biedl qui provoque obésité, difficultés à marcher, apnée du sommeil et hypersensibilité à la lumière. À trente-cinq ans, il n’avait jamais fait l’amour. Sa rencontre avec Christine, accompagnante sexuelle, lui a redonné confiance en lui. Depuis, il a perdu du poids, se sent mieux dans son corps et dans son esprit. Il a chassé ses idées noires. Avant Christine, il avait sérieusement pensé au suicide.

 

Se réincarner

 

Aider l’autre à s’aimer et à se sentir « aimable » est le combat de Marcel Nuss. « Des millions de personnes souffrent de misère affective et sexuelle en France », regrette-t-il. Les femmes handicapées pâtissent d’un manque de féminité : « Se maquiller, prendre le temps de s’habiller est plus compliqué. » Il évalue à un quart d’entre elles celles qui ont subi un viol dans leur vie, que ce soit par la famille, un professionnel ou une autre personne handicapée. L’accompagnement peut être un moyen de se réinventer, de se redécouvrir et de s’accepter. Même si, pour le moment, seulement 6% des mille demandes d’accompagnement reçues pas l’Appas sont féminines.

 

Les hommes, eux, souffrent d’un abandon de leur virilité. Une majorité d’entre eux se sent dévalorisée. « L’accompagnement sexuel pourrait leur ramener cela », estime le fondateur de l’Appas. Apporter de la confiance en soi et de l’amour propre, pour se construire ou se reconstruire grâce à la sexualité.

Un statut juridique flou

 

« J’encours 170 000 euros d’amende et sept ans de prison, rappelle le fondateur de l’Appas. Ça fait cinq ans maintenant que je m’expose à cela pour proxénétisme bénévole. » Un risque que cet essayiste militant est prêt à prendre, car il est convaincu que l’accompagnement sexuel est une vraie solution. Les “clients”, les personnes handicapées se faisant accompagner, sont susceptibles de recevoir une amende de 1500 euros, à laquelle peuvent s’ajouter deux ans de prison. Malgré tout, il en est persuadé : « Si on nous attaque, on aura gain de cause. » De fait, si des voix critiques émergent dans les médias, aucune n’a menacé son association de procès.

 

L’accompagnement sexuel est illégal. Au regard de la loi, en proposant des rapports sexuels tarifés, l’accompagnant se prostitue. Il vend son corps, que le droit français juge inaliénable. C’est en tout cas l’avis rendu par le comité consultatif national d’éthique (CCNE) en 2013 : « Il n’est pas possible de faire de l’aide sexuelle une situation professionnelle comme les autres en raison du principe de non-utilisation marchande du corps humain. »

Certains réussissent tout de même à se saisir de la question de la sexualité des personnes en situation de handicap, en s’affranchissant des tabous. C’est le cas de l’Institut médico-éducatif de Lanester, où les professionnels sont formés aux questions de vie affective et sexuelle.

Former le personnel des établissements accueillant des personnes handicapées semble primordial. Valérie Lepeltier est éducatrice spécialisée à Caen (Calvados). Depuis une quinzaine d’années, elle milite pour que la question de la vie affective et sexuelle des patients ne soit plus un tabou. « Cette question revient toujours, et tout le temps, assène Valérie. Je m’occupe d’adolescents en pleine expansion d’hormones ! »

 

Il y a cinq ans, cette éducatrice lance, avec un collègue, un module dédié aux jeunes déficients intellectuels, animé avec les moyens du bord : programme construit de toutes pièces, illustrations piochées au planning familial… Elle décide d’ouvrir un groupe de parole pour informer, avec un discours préventif ordinaire (grossesse, IST, consentement)… Mais pas seulement : « On n’envisage pas du tout une sexualité plaisir pour les personnes handicapées », déplore Valérie. Alors elle aborde avec eux le corps, les émotions, le consentement, le plaisir… En parlant avec des mots clairs : pénis, vagin, clitoris, orgasme. Adieu foufounes, zézettes et autres zizis.

Au planning familial

 

À Rennes comme dans toutes ses délégations, le planning familial s’engage : son programme d’information et de formation à la vie affective et sexuelle “Handicap et alors ?” s’adresse à la fois aux personnes concernées, à leur famille, et aux personnels médicaux. Des groupes de parole sont mis en place afin que les personnes en situation de handicap puissent échanger entre elles sur leurs expériences et poser des questions aux formateurs. Un programme qui fonctionne, puisque son budget augmente chaque année.

 

 

Un programme innovant

 

Initiative moins connue mais aussi positive, le programme “Mes amours” organise partout en France des expositions interactives sur la vie affective et sexuelle des personnes déficientes intellectuelles. Ces expositions sont co-animées par sept binômes, constitués d’une personne atteinte de trisomie 21 et d’une non-handicapée. L’objectif : identifier ses émotions, mieux connaître ses droits, et découvrir son corps.

Des résultats ?

 

« Il y avait un jeune, en particulier, qui se masturbait beaucoup et tout le temps. Ça devenait une souffrance et une angoisse », se souvient Valérie Lepeltier. Il ne connaissait pas son corps, et personne ne lui avait expliqué comment se faire du bien. Le groupe de parole l’a aidé à mieux se connaître et se comprendre.

 

Elle raconte également la manière dont ce groupe a permis de libérer une parole autrefois muselée : « Une jeune fille a pu comprendre qu’elle subissait des attouchements, tandis qu’un garçon a réalisé qu’il ne se sentait pas bien dans son corps, il voulait en fait être une fille. »

 

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Quinze ans que Marcel milite, autant d’années qu’il se sent au pied du mur. Alors il alerte, il rencontre les politiques, leur envoie, inlassablement, ses ouvrages, preuves de la souffrance et de l’isolement des personnes handicapées. « Je n’ai jamais eu la moindre réponse, très peu d’accusés de réception, déplore-t-il. Les gouvernements ne veulent pas prendre le risque d’un second “mariage pour tous”, alors ils ne font rien. »

 

Les politiques lui font défaut ; les médias, quant à eux, le soutiennent un peu plus, « pour le côté sensationnel », nuance Marcel Nuss. « Il n’y a jamais de véritable suivi, c’est ça qui est dommage. » Ce qu’il faudrait, selon lui c’est, au moins, un long documentaire diffusé à une heure de grande écoute.

 

Le combat d'une vie

 

Les critiques ? Il est prêt à les entendre. L’assistance sexuelle ne serait-elle pas une énième façon de marchandiser le corps de la femme ? « On respecte l’opinion et c’est leur droit », réplique-t-il. Pour lui, « dès qu’on touche à l’aspect privé, au sexe, à la mort, on se retrouve avec des intégristes en face ». Mais tant que l’accompagnement sexuel est fait de manière respectueuse, « on ne devrait pas avoir le droit de l’interdire », rétorque le militant.

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Au planning, des jeux interactifs sont disponibles pour expliquer les problématiques liées à la sexualité à tous les publics.

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Des réussites, Valérie en avait également obtenu dans son ancien poste, au sein d’un foyer de vie pour personnes en situation de handicap, où du personnel était présent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Un homme paraplégique de trente-cinq ans y vivait, sous protection urinaire permanente. Lorsque l’on changeait ses protections, « il attrapait systématiquement son sexe », témoigne l’éducatrice. Alors, elle s’est battue, pour qu’on le laisse dans une pièce, seul, afin qu’il puisse se toucher. Après ça, il a semblé s’épanouir.

 

 

Accompagné et accompagnant

Formation à l’IME de Lanester

Il y a cinq ans, Valérie a même envisagé de suivre une formation pour devenir accompagnante sexuelle. Mais l’absence de statut professionnel l’a refroidie. Parler de vie affective et sexuelle, libérer la parole est devenu son combat, pour que les personnes handicapées  se sentent mieux, tout simplement.

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Chapitre 3

Iris, 30 ans, souffre de la maladie de Little.

Paul, son kinésithérapeute témoigne.

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Savoir et comprendre

Il y a cinq ans, Valérie a même              envisagé de suivre une formation            pour devenir accompagnante            sexuelle. Mais l’absence de                        statut professionnel l’a refroidie.                       Parler de vie affective et                                      sexuelle, libérer la parole est                              devenu son combat, pour                              que les personnes                              handicapées  se sentent mieux,                        tout simplement.

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Iris, 30 ans, souffre de la maladie de Little.

Paul, son kinésithérapeute témoigne.

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